Obscurantisme et Informations
Epuisé
par cette semaine difficile, je me suis dis que j’allais me changer les idées
quand malheureusement, je fus ramener à la réalité par Minatech. Hé oui, demain
c’est son inauguration. De Villepin et toute sa clique vont être sur Grenoble
pour le baptême du temple de la dérive des sciences. Les Verts Isère ont donc
pour l’occasion organisé un débat à la MDA (Maison Des Associations) ce soir
afin de parler de Minatech. Je vous préviens tout de suite, je ne suis pas Vert
mais ma maudite conscience citoyenne m’a fait y aller.
J’aurais
dû m’abstenir, PMO (Pièces et Mains d’œuvre) et OGN (Opposition grenobloise
aux Nécrotechnologies) sont venues tout simplement pour insulter les Verts et
empêcher les intervenants de parler du sujet pour lequel ils avaient fait le
déplacement.
Je
peux dire aujourd’hui que j’ai pris conscience de la poussée de l’extrémisme
politique. On s’attarde trop souvent sur le FN, quand nous parlons
d’extrémisme. Mais il y a un extrémisme de gauche aussi, caché derrière les
belles idées alter-mondialiste et écolos. En gros, PMO et OGN reprochent aux
Verts, d’avoir voté le projet au Conseil Général et de maintenant se battre
contre Minatech sans être assez radical, car les Verts, en effet, n’en
demandent pas la fermeture. Ces remarques sont légitimes, mais ils se sont
expliqués sur ce vote, à l’époque où le projet était voté, il n’avait pas
l’expérience pour s’opposer à Minatech,
et seulement deux élus sur les quatre ont voté le projet. Ils n’ont d’ailleurs
plus jamais voté pour Minatech et la poursuite de ce projet. Ce qui me dérange
dans les attaques de PMO et OGN, c’est qu’ils ne prennent pas en considération
l’erreur humaine. Nos élu-E-s, qu’ils soient Verts, PS ou encore UMP, peuvent
faire des erreurs, et il faut accorder aux Verts le courage et l’honnêteté
politique de prendre en compte leurs erreurs, de les reconnaître et de changer
d’opinion. De plus, s’ils n’en demandent pas la fermeture, c’est parce qu’ils
acceptent le fait que nous ayons besoin de faire de la recherche dans le
domaine du « tout petit », mais pas à n’importe quel prix, ce n’est
donc pas la fermeture qu’ils veulent mais une transparence sur les recherches
effectuées à l’intérieure de Minatech et surtout qu’un comité éthique soit mis
en place afin d’éviter toutes dérives et abus par les nanotechnologies.
Mais ce qui fut encore plus choquant de la part de
PMO et de OGN, c’est l’obscurantisme face à la science. En effet, pour eux, les
sciences et la recherche sont là pour nous posséder, les sciences humaines et
sociales étudient nos comportements, c’est pour mieux nous contrôler, les
nanotechnologies veulent nous pucer (c’est-à-dire nous implanter des puces
électroniques), c’est pour mieux connaître nos faits et gestes etc… Ils veulent
donc que Minatech ferme, mais aussi que soient interdites toutes recherches sur
le vivant. Malheureusement, si nous suivons cette logique, aujourd’hui nous ne
pourrions jamais soigner une simple grippe.
Ce qu’il faut reprocher à mon avis, ce n’est pas la
recherche dans les nanotechnologies mais surtout que ce projet sera semi-privé.
Là, il y a de quoi s’inquiéter, car les dérives des entreprises privés sont à redouter,
surtout quand on sait comment elles brevètent le vivant et comment elles font
commerce avec ça. De plus, le projet n’a pas était soumis à une consultation
citoyenne. Mais tout cela, si vous suivez mon raisonnement, vous conviendrez
avec moi que cela ne dépend pas de la science en tant que telle, mais du
politique et des institutions. Minatech nous prouve une fois de plus que le
citoyen ne décide plus et que notre Véme République et périmée ! Il faut
un plus grand contrôle citoyen des institutions et des décisions qu’elles
prennent, mais il ne faut pas refuser la recherche, car elle est source de
malheur autant que de bonheur et nous ne pouvons pas nier notre humanité au
point de ne plus faire de recherche sur ce qui nous questionne profondément.
Moi aussi je redoute les dérives de la science. Quand
l’argent possède la recherche, celle-ci prend un chemin dangereux, nous en
avons des exemples précis, comme les OGM ou encore le nucléaire.
Mais
je ne suis pas opposé à la recherche, l’être humain à toujours chercher à
connaître ses possibilités, il veut savoir d’où il vient et jusqu’où il peut
aller. Notre nature humaine nous pousse vers la connaissance et je vis les
idées de PMO et OGN comme une interdiction de connaissance. Ils touchent à mon
avis, à une liberté fondamentale. De plus, il nous est possible de faire une
recherche qui ne soit pas la victime des dérives du capitalisme, mais pour cela
il faut laisser plus de place aux citoyens et permettre un vraie contrôle des
recherches par un comité éthique et citoyen. Finalement, leurs attaques m’ont
fait changer d’avis, je ne voulais pas adhérer chez les Verts, je voulais
rester dans l’associatif, même si celui-ci était très politisé, maintenant, je
sais que je vais prendre ma carte dans ce parti. Je ne veux pas laisser la
place à l’extrémisme, qu’il soit de gauche ou de droite, il est le même.
Ce qui m’a beaucoup effrayé ce soir, c’est la façon
qu’avaient PMO et OGN de parler de Minatech, pour eux, c’est une « boîte
de pandore ». Cette expression est revenu une multitude de fois dans leur
bouche. Pour le philosophe (de formation) que je suis, c’est très explicite, ça
montre un retour marquant aux superstitions et à la peur de l’inconnu.
« La boîte de pandore » est un mythe, c’était plus qu’une métaphore
dans leur discours, c’était un argument qu’ils pensaient raisonnable, mais cela
n’est point, ils ne se rendent même pas compte qu’ils sont dans la demi-mesure,
ils n’ont même pas le recule de voir qu’ils sont dans la peur. La pire des
peurs en plus, puisque c’est celle de l’inconnu, ce refus d’aller là où nous ne
sommes jamais allés. Je redoute cette superstition, car elle est signe d’une
fin de société. Quand la raison abandonne les esprits et que la démagogie prend
sa place, on ne peut qu’appréhender le malheur qui gangrène notre société.
PMO et OGN se trompent donc de bataille, enfermés
dans leurs peurs, ils ne voient pas que l’enjeux est politique. Si je devais
analyser cela philosophiquement, je dirai que le premier problème est
l’illusion que les hommes politiques ont de notre contrat social, pour eux, il
existe toujours mais c’est faux, il n’est plus là, ce qui nous lies tous
ensemble et nous fait faire société n’est plus. Comme me disait Bruno ce soir,
et je suis tout à fait d’accord avec lui, nous vivons sur une constitution qui
a été voté en 1958. Cela signifie qu’aujourd’hui, la majorité des français-E-s
vivent sur une constitution qu’ils n’ont pas voté et où ils n’ont même pas eu
leur mot à dire pour la construire. Le fond du problème est donc là, nous
faisons société sur un texte dépassé et qui ne correspond plus aux attentes des
individus. Les citoyens ont d’ailleurs perdus cette relation à la société,
puisqu’ils ne sont plus acteur du « vouloir-vivre ensemble » mais
simplement des individus passif qui votent quand on leur demande. A cela
s’ajoute beaucoup d’autre remarque, mais j’aurais la modestie de vous demandez
de lire A. de Tocqueville et sa Démocratie en Amérique, car il explique
avec beaucoup plus de génie que moi, les dérives de notre démocratie et l’égoïsme
moralement légitimé dans la notion d’individualité.