Garde à toi
Mercredi 29 novembre, anniversaire de ma maman. Un texto, simple texto pour lui dire que je pense à elle, que j'ai pas oublié, que je l'oublie pas...
Samedi 2 décembre, vers 18h00, le Kaporal est descendu me voir, à la base pour que nous sortions... Pas de motivation, pour rien. Je balance à l'improviste que nous pourrions nous tirer à Grasse. Quand ça va pas, le seul endroit où j'arrive à reprendre vie, c'est là où ma maman se trouve. Le Kaporal esquisse un « t'es sérieux ? », plus que jamais, « ça te dis ? »...
Samedi 2 décembre,
vers 23h00, ma soeur vient nous ouvrir en bas de la résidence,
nous montons, je rentre en premier dans l'appartement, le Kaporal
reste dans le couloir, ma mère tombe à la renverse en
me voyant, elle n'y croit même pas, me fonce dans les bras et
fond en larme...
Je ne sais pas pourquoi
je lui ai demandé de me ramener chez moi... Mais il l'a fait,
il ne me pose jamais de questions, mais il me suit dans mes
délires... Il sent quand je vais pas bien, l'autre nuit il a
foncé à 3h00 du mat pour me trouver des clopes et m'a
rejoint chez Erwil.
Il ne parle pas beaucoup,
mais il compense son silence par des milliers de gestes. Où
alors il me parle de lui, de sa vie à l'armée, du
pourquoi il ne voulait plus être un bon petit soldat... Lui et
Erwil sont un peu mes anges gardiens en ce moment.
J'aime bien quand le
Kaporal me raconte sa vie, elle est pourtant terrible, des choses
qu'on écrit pas sur un blog, on fait pas d'audimat avec sa
vie, on la raconte pas aux autres... Son regard est sombre, souvent
illisible, à se demander ce qu'il pense vraiment. On y trouve
aussi une certaine mélancolie, la mort parfois, il est un
corbeau qui ne volera plus. Il est jeune pourtant, à peine 21
ans, peut-être 22, mais il a vécu, les traces de la vie
sur son corps, qu'il a bien voulu décorer d'un tatouage...
Quand il parle, pas de poésie, juste des mots secs, des
maux qui le brûlent, crus et parfois vulgaires. Un écorché
vif...
Tout au long du week-end
j'ai eu envie de lui donner de l'affection, de le prendre dans mes
bras quand nous dormions, de le serrer fort contre moi... Effleurer sa
main dans la voiture ou encore l'embrasser à un moment où
son regard se posait sur moi. Ses yeux, comme une mise à nu.
Mais j'ai pas voulu céder à mes envies, je pouvais pas,
je peux pas... C'est trop tôt, Le Petit Prince m'a trop saigné
pour que je reparte aussi vite en amour.
Pourtant je pense à
lui tout le temps... J'ai peur de tomber amoureux.
Je pourrais pas le
porter, je pourrais pas l'aider, ni lui donner tout ce qu'il attend
de la part d'un garçon. Je suis encore trop faible, j'ai plus
la foi... Juste de l'égoïsme, assez pour pouvoir me
reconstruire. Et puis de l'autre côté, il y a Farid, son
ex, toujours fou amoureux de lui, Farid son ex mais aussi mon ami, et
je ne peux pas lui faire ça.
Hier soir il me racontait
que les lèvres du Kaporal lui manquaient... Je comprenais
cette confidence de Farid, ses lèvres... ses yeux... ses
mains... des choses que j'ai pu apprécier sans pouvoir
toucher... Sans même oser le faire...
Nous ne nous sommes pas
revu depuis dimanche. Lundi fut une vraie torture, il m'a manqué
comme si ça faisait une dizaine d'années qu'il était
dans ma vie. Aujourd'hui ça va mieux, je sais que ce n'est pas
bon de le désirer, d'alimenter cette attirance...
Il y a des choses à
taire, des amours à passer sous silence, d'autres ont le droit
de vivre, mais celui-là... Vaut mieux qu'il ne prenne jamais
forme...